Bon, je ne vais pas y aller par 4 chemins. Je ne rentre pas dans le moule. Mais alors, pas du tout. Déjà je n’ai pas le profil type : imaginez, je suis une femme de 37 ans. Pas mariée. Pas de gamins. Pas de maison à 3 chambres entourée d’une jolie barrière blanche. Pas de grand jardin. Et pas de chien pour courir dans le jardin que je n’ai pas. Y a rien qui rentre dans le moule. Alors forcément, c’est louche. Pire, ça dérange. Je suis la case « Autre » des formulaires. Je suis non-conforme. Avant j’en souffrais. Désormais je ne cherche plus à me soigner : j’en vis bien !
Pourquoi je suis décalée et inadaptée ?
Même si je suis obligée un minimum de jouer les caméléons pour m’adapter à l’environnement social dans lequel j’évolue, je me sens en permanence en décalage avec le monde qui m’entoure. Hormis le fait de ne pas avoir le profil type d’une femme jeune femme de mon âge, certaines choses font que je ne pense pas, n’agit pas et ne suis pas comme la majorité. Attention, je ne prétends nullement être mieux ou moins bien, juste différente. La preuve en 9 points en vrac.
1- Je ne bois jamais d’alcool
Déjà parce que cela me rappelle des souvenirs douloureux de mon enfance et ensuite parce que je préfère profiter pleinement de mes journées que de me réveiller défragmentée après une soirée beuverie. Devoir comater des heures affalée sur un canapé pour m’en remettre, trop peu pour moi. De toute façon je ne me sens pas à ma place dans les soirées beuveries.
Et en plus il y en a toujours un pour sous-entendre que parce que je ne bois pas, je ne suis pas marrante ou je ne sais pas m’amuser…
2- La vie en couple, oui, mais pas sous le même toit
Oui, je suis persuadée que la vie de couple qui me conviendrait le mieux serait chacun chez soi, sûrement parce que j’ai besoin de ma solitude autant que de mon amoureux… Oui je sais certains diront que je suis égoïste, que je n’ai rien compris, mais c’est ma façon de voir la vie. Se voir quand et comme on en a envie, et pas parce qu’il le faut sous prétexte qu’on est en couple. Mon idéal : 2 appartements dans un même immeuble.
Quand je dis ça, on me regarde bizarre…
3- Un pique-nique plutôt qu’un restaurant gastronomique
Les bons restos, ce n’est pas trop mon truc. Passer des heures le c.. sur une chaise alors que je suis déjà enfermée dans un bureau toute la semaine, trop peu pour moi. Même à Noël, je préfère pique-niquer le c.. par terre dans la neige là-haut dans la montagne que de me farcir un repas de 5H à me gaver comme une oie. De toute façon, je n’aime pas trop manger ou mal manger.
Ne pas être une bonne vivante côté bouffe, ça aussi c’est étrange pour beaucoup…
4- Enlever les murs du bureau
Plus ça va, plus j’ai du mal à rester enfermée dans un bureau. Le bureau c’est contre-productif. On est pollué par tout un tas de trucs propres à la vie en entreprise. Résultat : les dossiers avancent moins vite que si on travaillait au calme chez soi. Le bureau, ça tue la créativité, ça sclérose les neurones un peu. Un peu plus chaque jour. Entendons-nous bien j’adore mon métier, mais pas mon bureau ! Je rêve d’un bureau sans murs. Ou d’un bureau comme une bulle ouverte…
Mais encore une fois, ce n’est pas la norme…
5- Droguée au sport
Pas 3 ou 4H dans la semaine, ce ne serait pas suffisant… Plutôt une dizaine d’heures (oui, j’assume). Quand je dis ça en général on me regarde comme si je débarquais d’une autre planète, comme si j’étais cinglée. Mais j’en ai besoin : mentalement, physiquement, pour ma créativité aussi. Le sport est pour moi aussi vital que l’oxygène que je respire. Pas forcément des sports violents, moi ce que j’aime c’est l’endurance. En salle de sport, il arrive qu’on me dévisage comme une bête curieuse car je suis capable de marcher 1H30 sur le tapis à 7,5 km/h avec une pente à 15%.
Impossible de faire comprendre ce besoin vital quand pour la majorité des gens, le sport a surtout pour but de perdre du poids.
6- Perchée dans mes montagnes
Les montagnes, j’en ai besoin, c’est mon refuge, là où je me sens bien. Alors oui, je suis capable de faire 3H de route, et parfois plus, sur une journée pour grimper en raquettes ou à pied vers des sommets enneigés, pour observer la faune sauvage ou pour découvrir un lac d’altitude. Ce que j’aime, moi qu’un simple bruit de VMC bruyante, agace ? Le calme absolu. Alors je préfère ne pas sortir le vendredi soir pour pouvoir être en forme à l’aube pour aller là-haut…
Oser dire qu’on préfère boycotter bar et boîte du vendredi soir pour la montagne, ça passe pas toujours très bien…
7- Petit comité plutôt qu’énorme tribu de potes
Mes meilleurs moments, quel que soit l’activité ou le lieu, sont ceux où je suis avec peu de personnes. Introvertie, j’ai mis du temps à comprendre que c’était la raison pour laquelle je ne me sentais pas bien dans un gros groupe. Je n’ai pas besoin d’avoir 15 000 personnes autour de moi, un petit nombre suffit à mon bonheur. Et puis l’introvertie que je suis chéris aussi ses moments de solitude. Une solitude choisie.
Ça aussi ça dérange : préférer être seule, quelle hérésie ! Pourtant je vous rassure, je en suis pas associable, juste, j’aime pas le monde !
8- Le goût des choses simples
Plus le temps passe, moins j’ai envie d’avoir. Je préfère être. Si je pouvais, j’irai encore plus loin dans la dématérialisation. Le côté matériel pourrit l’existence. Je me fiche d’avoir une belle voiture full option (qui coûte cher en entretien). Le dernier portable sorti (juste pour avoir quelques millions de pixels inutiles en plus). Une maison immense (putain les heures de ménage en perspective). Des objets achetés et gardés au cas où. Qui nécessitent d’acheter encore plus de rangements pour les stocker. Même quand j’offre un cadeau désormais je préfère offrir « un moment à partager » type week-end, expérience originale parce que cela compte plus qu’un objet qui sera revendu peu de temps après sur ebay… Le temps partagé est bien plus précieux…
Mais avoir et posséder sont tellement associés à la réussite sociale que vouloir le contraire…
9- Boycott des fêtes familiales
Les traditions et événements de famille, je les boycotte. Pas envie de faire l’effort de sourire à des personnes qui passent leur temps à te critiquer le restant de l’année. Tant pis si ça ne se fait pas. Tant pis si c’est anormal. J’ai longtemps souffert de l’emprise familiale. Je ne regrette pas de m’en être dégagée. Pour plein de raisons. Je ne sais plus faire l’hypocrite, la petite fille modèle s’est envolée.
Affirmer vouloir vivre des Noël différents fait généralement halluciner les gens… Je le vois bien à leur silence…
Bon j’arrête là car je sais bien que tout cela n’est pas dans la norme. Encore, l’un de ces 9 points, passons. Mais les 9 points cumulés… Et en plus je vis pour être voyageuse. Sauf que là, ça fait des jaloux qui se disent que j’ai de la chance, que je gagne bien ma vie pour vadrouiller ainsi à travers le monde. Peu de personnes imaginent que je fais des sacrifices, que j’économise pour voyager, quitte à me priver d’acheter d’autres choses.
Voyageuse. Intermittente. Mais c’est mieux que rien.
Rien. Non rien ne me prédestinait à voyager. Ça m’est tombé dessus comme ça en 2005. Sur un coup-de-tête. Cette envie de vadrouiller ailleurs aussi bien qu’ici ne m’a plus quittée depuis. Les vacances chez moi, sûrement pas. Faut toujours que je foute le camp. Jouir de Liberté. Briser le cadre. Ne pas avoir d’horaires. Ne rien programmer. Juste partir. Pour une journée. Un week-end. Un pont. Une semaine. Plusieurs semaines. la plupart du temps dans des grands espaces où la Nature existe encore. Changer de toit. Changer de moi. Enlever le masque. Être voyageuse plutôt que voyagée.
On me prend pour une instable. Comme si je cherchais à fuir. Peut-être. Peut-être pas. J’ai juste besoin de pouvoir être hors du moule sans être jugée, critiquée, disséquée.
J’ai longtemps souffert de me sentir différente. Longtemps culpabilisé. À 37 ans, à défaut d’avoir eu le cran d’envoyer tout valdinguer, j’ai trouvé un équilibre fait de petites choses qui m’évitent d’être trop longtemps dans un état contre-nature. Et j’ai compris que je n’étais pas la seule à me sentir incapable de rentrer dans le moule. Certains « se soignent » pour y rentrer. Certains se barrent, définitivement. D’autres comme moi s’en accommodent, en plaçant des fenêtres sur les parois du moule pour pouvoir s’en échapper dès que l’envie s’en fait sentir.
Non, je ne rentre pas dans le moule. J’y arrive pas. Je n’y arriverai jamais. Je n’ai plus envie de verser des larmes en catimini à force d’essayer. Pas envie de me soigner. C’est pas une maladie d’être différente. Alors je me suis fait une place à coté du moule, grâce à des petits riens qui ont rempli ma vie de soleil…
Je vis ma vie comme un voyage à contre-courant. Et finalement, je me demande si le mot « norme » a vraiment un sens. Bah oui, pourquoi mes normes à moi ne seraient-elles pas tout aussi valables que celles de Pierre, Paul, Jacques ?
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