C’est un fait indiscutable : le voyage s’est démocratisé. On a beau dire que c’est la crise, que le pouvoir d’achat a baissé, que les gens se serrent la ceinture… Peut-être… Il n’empêche… En période de vacances, les aéroports grouillent de colonies d’êtres humains, et un nombre impressionnant d’avions quadrillent le ciel pour débarquer une meute de touristes et de voyageurs guidés par leur soif de découverte et de dépaysement sur les tarmacs des 4 coins du monde…
Banalisation du tourisme
Aujourd’hui, force est de constater que le voyage est entré dans la catégorie des produits de consommation courante : on consomme le voyage comme on achète une baguette de pain…
Et cette banalisation du voyage n’en finit pas de s’accroître avec :
- la multiplication des offres de billets d’avion pas chers,
- la croissance des vols low cost,
- la bataille acharnée que se livrent les marques de guides papier pour avoir les faveurs du client
- la croissance galopante des différents types d’hébergements : des chaînes d’hôtels 5 étoiles, aux backpackers, en passant par les chambres d’hôtes, les lieux insolites ou les toits de charme.
- la diversification des formes de voyage : all-inclusive, circuit organisé en groupe, voyage thématique, vol sec, autotour…
L’aventurier, une espèce en voie de disparition
Il y a encore quelques dizaines d’années, seule une poignée de voyageurs, mus par leur âme d’aventuriers, avaient la chance de s’envoler pour des horizons lointains.
A l’époque, il n’y avait pas de guides papier pour les assister dans leur voyage, pas non plus de forums où échanger les bons plans, ni de blogs de voyage pour copier-coller des itinéraires de précédents voyageurs… Non, rien de tout ça, juste une folle envie de découvrir des terres lointaines vierges de toute forme de tourisme, juste un désir irrépressible d’inventer des chemins, ceux-là même qui seraient balisés par le tourisme et pour le touriste quelques années plus tard…
Si aujourd’hui, l’aventurier est une espèce en voie de disparition, ce n’est pas parce l’état d’esprit s’est perdu mais parce que la planète a été balisée, aménagée, artificialisée, folklorisée par le tourisme. Du coup, les coins secrets, ceux qui vous scotchent à jamais, ceux qui n’ont pas vendu leur âme au Dieu Tourisme, ont été réduits à une peau de chagrin…
Les aventuriers sont aujourd’hui dans la même situation que l’ours polaire : les contrées inconnues ont fondu aussi vite que la banquise, mettant en péril l’essence-même du voyage.
Partager ses coups-de-cœur… ou pas ?
Amis blogueurs et voyageurs, vous qui partagez sur la toile vos expériences de voyage et vos adresses fétiches, vous arrive-t-il, comme moi, d’hésiter à partager vos coups-de-cœur et petits morceaux de paradis hors-des-sentiers-battus que vous avez dénichés, non par égoïsme mais par peur que des consommateurs de voyage ne viennent en dénaturer l’âme, par peur qu’un excès de touristes n’en pervertissent le côté diamant brut ?
Écrire un article sur un lieu, une adresse dans un endroit oublié du monde, sur une possibilité encore relativement singulière et le publier sur internet, n’est-ce pas contribuer à sa vulgarisation, à en faire un lieu touristique ?
Bien entendu, je n’ai la prétention ni d’être une dénicheuse d’endroits qui n’auraient pas encore été foulés par l’être humain ni d’avoir un blog lu par des milliers d’internautes, mais je ne peux m’empêcher de me demander s,i en faisant la promotion et la publicité de ces bouts du monde non pervertis par le tourisme de masse, je n’agis pas à contre-courant de mes valeurs de voyageuse…
En tant que blogueuse, est-ce que je ne joue pas un rôle, même infime, dans la perversion touristique que j’exècre tant ?…
Et vous, qu’en pensez-vous ?
Vous arrive-t-il de douter parfois du bien-fondé de ce que vous écrivez ?…
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