Gros gros mélange d’excitation et de flip intérieur !… Emprunter 200 km de piste en Patagonie et de nuit, c’est juste transgresser 2 des principaux conseils (avisés) qu’on te donne lorsque tu loues un van en Argentine ! Ouais car sorti des routes asphaltées, tu ne croises ni habitation ni véhicule sur des centaines de km. Autant dire qu’en cas de problème, t’es en rade complète ! Genre t’as plus qu’à essayer de gagner la ville la plus proche (hum…) à dos de guanaco (hum hum…)
Comment j’en suis arrivée à emprunter 200 km de piste en Patagonie et de nuit
J’avais déjà emprunté des bouts de piste, comme pour aller à Punta Tombo par exemple. Mais jamais encore une telle distance au beau milieu de nulle part.
Après une journée mémorable au Perito Moreno, le soir, un vent à décorner les bœufs nous empêche de dormir n’importe où. J’ai l’impression d’être dans un shaker, pas dans un van ! À force d’errer dans El Calafate, on finit par dégoter un camping rudimentaire, le « El Niriguao ». L’accueil est charmant, c’est propre, mais super basique. Les chasses d’eau des WC ne fonctionnent pas. Sur les 3 douches une seule offre de l’eau chaude. Les emplacements sont à l’abri du vent, c’est déjà ça. De toute façon, on n’a guère d’autre solution. Après les km accumulés ces derniers jours, la fatigue est là. L’humidité, le froid et le vent ne font que renforcer cette sensation de fatigue.
Calfeutrée dans le van, je tente vainement de me réchauffer grâce au repas chaud, seul réconfort de la soirée ! Le sac de couchage est glacial. Mais la fatigue aidant, je rejoins Morphée rapidement.
Lendemain matin. Toujours ce froid. La pluie en plus. J’ai du mal à trouver la motivation d’aller sous la douche.
La banque. 1H30 d’attente. La pluie toujours. La lessive à récupérer. La pluie encore. Un resto pas terrible. La pluie. La pluie. Et la pluie annoncée sur El Chalten censée être notre prochaine étape avec de sublimes randos à la clé. Va falloir être raisonnable. Histoire de ne pas bouffer du km pour rien. On a déjà beaucoup roulé et si on va à El Chalten pour rien… Pourtant El Chalten j’en rêvais. Mais faut se rendre à l’évidence : si c’est pour arriver là-bas et ne pas pouvoir faire de randos, aucun intérêt.
Et puis El Calafate c’est mignonnement touristique, mais les grands espaces nous manquent. Après moultes tergiversations, on décide de retourner sur la côte Atlantique. Il est 17H. Pour économiser le détour quelques centaines de km via la Ruta 3 (route entièrement asphaltée) qui passe à Rio Gallegos au Sud, on est pris d’un grain de folie et on décide de :
COUPER LA PATAGONIE À L’HORIZONTALE.
Ce qui signifie juste qu’en sortant d’El Calafate, on va emprunter la Ruta 9 sur 200 km. Si elle s’appelle »Ruta », la Ruta 9 n’en est pas moins une piste.
On ne sait rien de ce qui nous attend. Prendre la piste en Patagonie à 17H, c’est quand même un peu l’aventure…
La Ruta 9 : c’est parti pour un tour de piste en Patagonie
La piste en Patagonie, un souvenir inoubliable ! La Ruta 9 est une bonne piste, mais ça reste une piste : pas question de faire du 110 km/h avec le van ! Déjà 50-60 km/h c’est pas mal !
Ça secoue. Une nouvelle fois, c’est la fête dans les placards à l’arrière ! L’avantage ? Les œufs seront déjà battus pour l’omelette !
Le soleil fait son grand retour pour nous accompagner. Bon, le vent aussi. Mais ça, on commence à avoir l’habitude. La lumière sur les immensités désertiques de Patagonie est exceptionnelle. Le rien dans toute sa grandeur. Jamais de ma vie je n’ai pris autant de plaisir à traverser des paysages.
Il n’y a vraiment rien. Pas d’habitation. Pas de civilisation. Pas d’âme qui vive. Ah si des guanacos, beaucoup de guanacos. Magnifiques. Indomptables. Libres.
On croise 1 ou 2 voitures. Puis plus rien.
Bon, je prie quand même secrètement de ne pas tomber en panne là. Au beau milieu de nulle part. Avec des connaissances en mécanique… comment dire… nullissimes… mais en même temps, c’est terriblement excitant ! Le paysage et la piste sont à nous sur des dizaines et des dizaines de km. Jamais le « Rien » n’avait signifié autant pour moi. Jamais le « nulle part » n’avait pris autant de place, allumant les étincelles de l’aventure dans ce regard d’enfant que je n’ai jamais perdu.
Comment vous expliquer à quel point je suis sous le charme de la grandeur du nulle part et du rien ?… Impossible. D’ailleurs en lisant ces quelques lignes, vous devez me prendre pour une folle !
La Ruta 9 ne figure pas dans les incontournables des guides de voyage. Mais cette piste en Patagonie restera un Must de mon roadtrip.
Et puis, il y a ce ciel. Ce ciel qui prend des couleurs surréalistes, des teintes inimaginables. Comme si c’était le ciel d’une autre planète. Aucune de mes photos ne lui rend pleinement hommage. Comme si l’appareil photo était incapable de reproduire ces couleurs spectaculaires.
Plus l’heure avance, plus le ciel est haut en couleurs. Coucher de soleil de folie. Bleu. Rose. Violet. Mauve étrange. Une incarnation fascinante de l’extraordinaire.
La nuit approche furtivement. Le bout de la piste n’est pas en vue.
Le vent patagon, jamais rassasié, s’amuse comme un fou. Je vous dis pas comment les pauses techniques sont compliquées avec la force du vent…
La nuit est prête à avaler le van. On n’y échappera pas. Maintenant on avance dans l’obscurité, une espèce de peur naissante en bandoulière…
Il est près de 20H30 quand on sort de cette mémorable piste en Patagonie. Ruta 3 asphaltée, nous revoilà ! On fait encore 11 km pour arriver à l’entrée du Parc Monte Leon. Au top départ pour y entrer le lendemain. On se gare là. Pour ce soir, ça ira bien.
Le ciel est troué d’étoiles. Mon rêve de Patagonie. En un tour de piste.
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